samedi 18 février 2012

Page 2 (Juliette Sabbah)

[Compilation des épisodes de la semaine, formant la page 2 du texte de Juliette Sabbah]

Puis une loupe. Elle se baissa, s’empara du pied gauche du voisin toujours évanoui, retira la chaussure puis effectua une brève torsion du gros orteil. L’effet fut immédiat : l’homme ouvrit un œil, puis deux. D’abord vaguement éteint, son regard s’éclaira ensuite tout-à-fait. Il la fixa. « Le Boulier… ? » murmura-t-il, et encore quelque propos fleuris qu’elle ne comprit pas. C’était donc ça ! Le Boulier la suivait-il jusqu’ici ? Il lui suffisait d’avoir échappé à l’incendie… « Je ferais mieux de sortir d’ici avant que cet avion ne percute un immeuble » se dit Maya, constatant que l’appareil filait droit vers le sol. Elle se leva en tentant de conserver son équilibre.
Le jour s’était levé à l’extérieur et les passagers affichaient tous un air neurasthénique de condamnés résignés à leur sort. En un clin d’œil, Maya comprit que l’avion n’allait pas s’écraser, que ceci n’était rien d’autre qu’un avertissement du Boulier ; il la suivait donc comme une ombre maléfique. Après une rapide évaluation de la situation, elle décida de se rasseoir. Ce n’était pas le jour des superhéros et de toute façon, l’avion avait repris un rythme de croisière ; en bas de l’appareil s’étalaient des champs de fleurs, une rivière coulait sous un pont. Les gants et la loupe allèrent rejoindre, au fond du sac de Maya, sa lampe de poche et son jeu de clefs. Il fallait plutôt interroger le voisin qui la regardait avec une étrange fixité.
Maya prit donc son souffle et lâcha : « Ne me faites pas ces yeux sombres. Regardez, moi, je souris et pourtant, j’ai perdu ma maison dans un incendie, je risque de me retrouver à dormir à la belle étoile ou à habiter une tente. Après tout c’est vous qui m’avez parlé du Boulier. Souriez un peu, nous ferions mieux de coopérer. »
L’homme se déridait peu à peu, à mesure que l’avion entamait sa descente vers l’aéroport de New Delhi. Les passagers aux alentours semblaient avoir oublié l’épisode orageux ; comme si celui-ci n’avait été qu’un mauvais rêve. Un beau sourire flotta un moment sur ses lèvres. « Parlons donc du Boulier, avant que nous ne touchions terre », commença-t-il. Mais avant, je voudrais en savoir plus sur cet incendie ». Maya, qui commençait déjà à méditer à la manière dont elle pourrait aménager sa tente de réfugiée, revint à la réalité. « Parlons plutôt de ces mystérieux insectes » répliqua-t-elle. Elle avait fait mouche ; l’homme décrocha son médaillon en forme de scarabée, et l’ouvrit.
À l’intérieur, se trouvait un microscopique enregistreur de la taille d’un dé à coudre ; il suffisait à l’homme d’une simple pression des doigts pour déclencher un bruit d’abeille ou encore un tic-tac de minuterie. Maya le fixa avec curiosité et demanda : « Vous avez encore d’autres choses dans votre scarabée ? » Sans lui répondre, l’homme reprit : « Je pensais bien que ce bruit vous rappellerait quelque chose. Voilà des mois que je parcours le monde, à la recherche de la clé du mystère du Boulier. Je crois que vous pouvez m’aider »


(à suivre)

Juliette Sabbah

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